Pendant la guerre de 14, mon grand-père tenait la ferme, sauf lorsqu'il accomplissait son "service territorial", on disait aussi qu'il était " de la territoriale". Il était convoqué pour surveiller une gare, un pont, un site important, ça pouvait être à 30 km, de jour comme de nuit. Le but était de surveiller les mouvements de l'ennemi et de voir qu'aucun espion ne vienne saboter les positions importantes.
Les territoriaux constituaient un groupe de civils, sous les ordres d'un responsable, un militaire, ils montaient la garde. Ils étaient armés à la façon territoriale, avec des fusils Lebel qui avaient dû faire la guerre de 70. Ils montaient la garde pendant le temps qu'il fallait : on leur envoyait une convocation disant : "vous allez à tel endroit, à tel moment". Ils portaient l'uniforme des gardes territoriaux. C'était les vieux. En général, ils savaient tirer au fusil, puisque c'était obligatoirement d'anciens militaires. Mais ils n'étaient plus appelables pour aller faire la guerre.
Vieux ? Mon grand-père avait 43 ans en 14, il n'a jamais été envoyé au front. En plus de son âge, il n'était pas appelable aussi à cause de ses cinq enfants dont l'aînée avait 16 ans.
Son fils aîné a travaillé à la ferme jusqu'à ce qu'il ait l'âge pour être mobilisé en 1917 (il était de 1898). A 19 ans, il a été versé, après ses classes, dans l'artillerie au front.
A l'époque, le grand-père cultivait du blé; il avait six ou sept vaches, avec les veaux; et puis la basse-cour et le jardin maraîcher, cultivé par la grand-mère, mais labouré par le grand-père une fois par an. Leur fils, quand il avait 16 ans, avant de partir à la guerre, commençait à labourer un peu, ramasser le foin, faner, etc.
Ma mère avait 10 ans en 1914; elle s'occupait des vaches et de la basse-cour. Elle a remplacé son frère quand il a été mobilisé à 19 ans.