Ceux qui sont revenus.

[Un du village]

Pour ceux qui sont revenus : ceux qui ont fait les tranchées, ceux-là étaient fichus, physiquement, moralement.
Au village, il y a eu des gens gazés. Ceux qui se sont battus et qui sont revenus, sont revenus méchants, révoltés, prêts à en découdre à chaque instant, pour une discussion de bistrot, pour un bout de terrain, pour une borne, prêts à sortir le fusil.

Révoltés contre quoi ?
"J'ai fait la guerre, on ne va pas m'en raconter, tu ne vas pas me dire, etc." Ils étaient d'autres hommes. Etre confrontés à des conditions inhumaines pendant 4 ans, ils en étaient transformés, ils étaient devenus un peu des bêtes sauvages.
Par exemple, au moment du remembrement de Cergy, on a remembré la plaine en 1951; d'ailleurs c'était un fouillis de petites parcelles incultivables; il y a eu des bagarres internes, des vieux qui tenaient à leur poirier, sortaient le fusil; étaient prêts à tuer, comme en 14. Si tu touches à mon poirier, je te tues.
J'avais un oncle mauvais, innapprochable; bardé de décorations. Il avait fait Verdun, la bataille de l'Argonne. C'était un héros, il est revenu à moitié fou.
Cela, c'est quand ils étaient acceptés, quand on ne les traitait pas de simulateurs : regardez l'horreur, les mutineries de 1916, il y en a eu 800 qui ont été fusillés. Il n'y en a pas eu du village.

[Fille du Vent]

Pourtant, le "dernier poilu", décédé il y a peu de temps, semblait vraiment très serein, plein de compréhension pour les autres.
Peut-être avait-il moins souffert ? Ou bien c'était son caractère ?
Mon grand-oncle lui, était revenu de cette guerre, plein de cynisme, d'une ironie mordante.

[WorldMusic]

Mon grand-père était camerounais.
Il avait été mobilisé par la France après le départ des allemands.
Il est revenu couvert de médailles.
Il n'a jamais parlé de ce qui s'était passé. D'ailleurs, c'était un homme qui ne parlait pas. Mais il savait écouter.
C'était un homme très pieux. Trois fois par jour, matin, midi et soir, il allait s'agenouiller devant un meuble où il avait posé des images pieuses et une statue de Marie; puis il priait longuement.
Ensuite, il se remettait sur son lit où il passait presque tout son temps; il priait ou lisait. Les enfants venaient vers lui pour lui parler.

[Guy]

Voici les références d'un livre, qui pourrait vous intéresser :
"Le deuxième roman de Michel Sibra.
Impliqué dans le projet de réouverture du cinéma l'Eden à Montmorency, à travers l"Association Rallumons l'Eden qu'il a présidée jusqu'en mars dernier, Michel Sibra, réalisateur et cinéaste installé à Montmorency, est aussi romancier.Il vient de sortir la Guerre de Jop, son deuxième roman, après avoir obtenu, en 1998, le prix du quai des Orfèvres avec" la Danse du soleil".
Son histoire raconte l'histoire de Jop le Zouic, un jeune marin breton qui part à la guerre en 1914. Il connaitra les batailles sanglantes.
"J'ai voulu décrire les turpitudes de l'espèce humaine. C'est un prétexte pour dépeindre une guerre civile à l'échelle de l'Europe", explique Michel Sibra. Il veut aussi profiter des cérémoines du 11 Novembre. Ce sera une commémoration pas comme les autres puisque ce seront les 90 ans de la signature de l'Armistice et que le dernier poilu est mort cette année."
("La Guerre de Jop" paru aux Editions Thélès, 19.90€).

Un autre avis sur ce livre : "Un récit très librement inspiré de la vie de soldat d’un pépé, boulanger guingampais, incorporé au 76 e Régiment d’infanterie à Coulommiers et revenu du front, la gueule cassée et l’âme meurtrie. "